Les cristaux magnoniques, une nouvelle branche pour l’électronique souple
Bien qu’encore récent, le domaine des systèmes magnétiques souples connaît de grandes avancées et dessine des applications de mieux en mieux identifiées. Des scientifiques du Laboratoire des Sciences des Procédés et des Matériaux (LSPM - CNRS/Université Sorbonne Paris Nord) et de l’Université nationale de Singapour ont présenté un résumé de l’état de l’art sur ces recherches. Publié dans la collection Perspectives du Journal of Applied Physics, leur article décrit en particulier les cristaux magnoniques, capables de sélectionner et de contrôler les fréquences des ondes magnétiques.
Alors que les appareils électroniques prennent des formes de plus en plus complexes et que les textiles intelligents incorporent de nouvelles fonctionnalités, les solutions souples suscitent un intérêt grandissant. Ce large champ de recherche est confronté au problème récurrent de devoir garantir la durabilité et les performances des matériaux, dont les propriétés ont tendance à se dégrader au fil des gains de flexibilité. Les systèmes magnétiques souples sont ainsi fabriqués sur des substrats de polymères adaptés à d’importantes déformations, mais leurs nanostructures inorganiques porteuses du magnétisme sont beaucoup plus fragiles. Ces objets pourraient pourtant servir de capteurs ou de systèmes électroniques et magnétiques, capables d’être installés dans des milieux très confinés et courbés. Des chercheurs du Laboratoire des sciences des procédés et des matériaux (LSPM - CNRS/Université Sorbonne Paris Nord) et de l’Université nationale de Singapour, réunis depuis 2019 dans le cadre de l’International research project (IRP) Stretch-Smart, ont dressé un état des lieux de la recherche internationale, y compris de leurs propres travaux, sur les systèmes magnétiques nanostructurés souples.
Les auteurs ont en particulier mis en avant les avancées sur les cristaux magnoniques lithographiés sur substrats polymères. Les cristaux magnoniques sont des réseaux artificiels de nanostructures qui présentent des bandes de fréquences interdites pour des ondes magnétiques de gammes bien définies et contrôlable. Cela permet d’encoder, de transmettre et de stocker des informations à partir d’ondes magnétiques, comme de nombreux systèmes le font déjà avec des électrons ou des photons. Ces systèmes souples ont pu être développés grâce à leurs nanostructures, qui localisent les déformations dans des espaces qui ne sont pas porteurs des propriétés magnétiques. Dans certains cas, ces déformations peuvent même servir à contrôler ces bandes interdites et on parle alors de « straintronics ». La faisabilité de ces systèmes a été démontrée, et les chercheurs les optimisent à présent. Ces avancées ont été rendues possibles par le développement de procédés expérimentaux et de modèles numériques. L’article met également en évidence les verrous que rencontre encore le domaine, comme la difficulté de fabriquer, par lithographie, ces réseaux nanostructurés sur de grandes surfaces. L’équipe compte en tout cas identifier des applications directes basées sur des systèmes magnétiques souples, et les faire entrer dans une phase de maturation dans les cinq prochaines années.
Références
Prospects toward flexible magnonic systems.
D. Faurie, A. O. Adeyeye, and F. Zighem.
Journal of Applied Physics 130, 150901 (2021).
https://aip.scitation.org/doi/10.1063/5.0055976